« Ses intimes et sa famille le surnommaient Papouk mais personne ne se serait risqué à les imiter sans y avoir été invité. Papouk en imposait. Et adorait ça. Ce surnom affectueux aux consonances slaves ne résonnera plus dans l’enceinte du Cirque d’Hiver où il vivait avec sa femme Anna dans un appartement niché au-dessus de la piste. Le patriarche de 82 ans s’en est allé, ce jour, rejoindre sa mère, Madame Rosa, disparue l’an dernier dans sa 108e année.
Passionné par les éléphants, Sampion Bouglione avait débuté avec les chevaux à 12 ans, l’âge où les gamins qui « n’ont pas eu la chance d’avoir eu une vie exceptionnelle comme nous » usaient leurs fonds de culotte sur les bancs de l’école. Ne pas avoir été longtemps à l’école, c’était un petit complexe qu’il évoquait de temps à autre. Et pourtant, il savait tant de choses ! Sa culture n’était pas livresque mais artistique et sa sensibilité n’était pas feinte.
On ne la lui faisait pas à Sampion Bouglione ! Sous des dehors bourrus, il était la tendresse et la générosité même. Toujours le mot pour rire, la blague virile. Pour tester son auditoire… Quand on lui disait qu’il avait appris à la dure avec Joseph, son père, d’une intransigeance sans égale, il préférait parler de « respect » même si, derrière ses lunettes fumées, les larmes au bord des yeux laissaient deviner un manque de reconnaissance, peut-être. Mais en ce temps-là, l’amour père-fils ne se formulait pas…
Avec son frère aîné, Émilien, il a « tenu la boutique », comme il disait… Des décennies à sélectionner et produire des numéros prestigieux que le monde entier s’arrachait, à flirter avec les étoiles sur cette piste mondialement connue et reconnue. Pour, encore une fois, honorer la mémoire de ses illustres ancêtres. « Mon grand-père nous répétait : « Vous devez vendre du rêve ». Le credo de la dynastie Bouglione.
Son épouse Anna, son fils Francesco, sa fille Sandrine et toute la famille Bouglione pleurent celui qui était considéré comme le Maître des lieux et un pilier de cette dynastie. »

Sampion Bouglione

Propos de Sampion Bouglione recueilli le 28 decembre 2018:
« Nous les gens de Cirque, on a la liberté que l’on prend et ça, ça n’a pas de prix. C’est ça la belle vie. Le Cirque, c’est ma vie. Notre univers, c’est le Cirque ».
« On a un regard sur l’extérieur que l’extérieur n’a pas sur nous ».
« Pour moi, quand je suis au Cirque d’Hiver, je me sens en sécurité ».
« L’odeur du Cirque, c’est sain, c’est propre. Le Cirque, c’est accessible à tout le monde, c’est quelque chose de merveilleux ».
« Le Cirque, c’est un virus. Quand on l’a, il ne s’en va pas. Il n’y a pas d’antidote. Mon fils Francesco a le double virus ».
« J’ai commencé dans le métier, j’avais 7 ou 8 ans ».
« Mon père n’aurait pas toléré qu’on ait un passe-droit ».
« Je vais vous choquer : le métier d’artiste, moi personnellement, je n’ai jamais aimé. Ce qui me plaisait, c’était l’organisation. La vie dans la piste, ce n’était pas ma vie ».
« La vie de Cirque ne s’apprend pas à l’école. Quand on commence l’alphabet du Cirque, on touche un peu à tout ».
À propos des dresseurs d’éléphants : « Il y a des artistes qui ont des dons. Pour moi, il y a eu Gunther Gebel et il y a Rene Casselly Jr. C’est le numéro 1 dans le monde ».
« Le risque dans le Cirque, c’est un risque permanent. On est dans le danger perpétuel ».
À propos de son oncle Firmin et de sa première entrée dans la cage aux lions à 12 ou 13 ans : « Ça n’aurait pas été mon oncle, je ne serais pas rentré. Je savais qu’avec lui, il ne me serait rien arrivé. Je lui ai dit : Mon oncle, si tu me dis que je peux rentrer, je rentrerai avec plaisir et en confiance ».
Le Club du Cirque adresse toute sa sympathie et ses condoléances à son épouse, ses enfants, sa famille et ses amis pour ce grand personnage du cirque.
Au revoir Sampion, tu ne sortiras pas de nos souvenirs.
Source: Annonce FB de Cirque d’hiver Bouglione
2019-05-24_nh_MV (mise à jour)